Étiquette : Etats Unis

  • Pourquoi les résultats des élections américaines prennent-ils autant de temps ?

    Pourquoi les résultats des élections américaines prennent-ils autant de temps ?

    Salut, c’est moi Oncle Gator. Je suis de retour après plusieurs mois d’absence. Je sais, je suis aussi surpris que vous. C’est que pendant que vous avez passé les derniers mois confinés à vous emmerder chez vous après avoir épuisé le catalogue de Netflix, moi, j’ai bossé… Genre 10 fois plus que d’habitude. J’ai limite frôlé le karoshi.

    Mais bon ça se calme un peu ces temps-ci, et je refais un peu surface. (Sinon, ça si vous intéresse, je suis quand même actif sur Twitter, hein)

    Au moment où je tape ces lignes, il semble clair que trois jours après le jour des élections américaines Joe Biden est élu président des États Unis d’Amérique.

    « Trois jours après »…. « Semble »… « C’est même pas officiel »…

    “Mais pourquoi est-ce que ça prend si longtemps ?”

    Entend-je aux quatre coins de l’internet de la part de mes compatriotes habitués à avoir les résultats de leurs élections le dimanche à 20h00 pétantes, voire même avant, en douce, sur les sites internets belges.

    Eh bien je vais essayer de vous expliquer.

    Commençons effectivement par la France, où nous avons toujours les résultats à exactement 20h00.

    Oui… Sauf que non. Ces résultats à 20h00 ne sont jamais officiels. Il ne s’agit toujours que d’estimations. Estimations basées essentiellement sur deux choses.

    Tout d’abord, les bureaux de vote dans la plupart du pays ferment à 18h00. Ça laisse deux heures aux dépouilleurs pour dépouiller. Et je ne sais pas chez vous, mais dans ma ville natale les bureaux de vote sont nombreux, les dépouillements se font assez rapidement. Mais dans les grandes villes ça prend plus de temps, surtout quand les bureaux ferment à 20h00.
    Sauf que ces résultats partiels sont accompagnées de sondages aux sorties des urnes. Et si les sondages du genre “pour qui allez-vous voter ?” ne sont pas toujours fiables, essentiellement parce que les gens mentent ou changent d’avis, les questions du type “pour qui avez-vous voté ?” le sont beaucoup pus. Les gens ont moins de raison de mentir (on regrette rarement son vote quelques minutes à peine après avoir mis son bulletin dans l’urne, ça vient plus tard), et ils ne peuvent plus changer d’avis.

    Les deux décomptes permettent en général d’avoir une idée précise à 20h00 du résultat d’une élection comme l’élection présidentielle. D’ailleurs remarquez que quand nous avons des élections locales, même si l’hyper-centralisme de la France transforme tout scrutin en débat national, même et surtout quand il ne le devrait pas, les résultats prennent parfois plus de temps à arriver. Tout simplement parce qu’une élection nationale est souvent moins serrée qu’une élection locale.

    Et c’est là que se trouve le début de l’explication de la lenteur des résultats américains. L’élection présidentielle américaine est une élection locale.

    Ah oui, tiens, comment elle marche cette élection présidentielle aux États Unis, en fait ?

    Comme j’espère vous le savez déjà depuis le temps (et au moins depuis 2000, sinon depuis 2016), l’élection présidentielle américaine ne se fait pas au suffrage universel direct, mais au suffrage universel indirect. Ce sont vraiment les grand électeurs qui votent vraiment pour le président, pas les gens. Et cette élection, qui n’est bien souvent qu’une formalité, se déroule en décembre.

    Cette élection n’est bien souvent qu’une formalité parce que c’est le vote de début novembre qui détermine qui va choisir ces électeurs dans chaque état. Chaque état dispose d’un nombre prédéterminé d’électeurs. C’est le total du nombre de sénateurs (2 par état) et de représentants (députés en France) dont un état dispose. Je passe aujourd’hui sur le pourquoi de la chose, je vous explique seulement le comment.

    Dans 48 états, c’est la règle du “winner takes all”. Cela veut dire que la marge de victoire d’un candidat dans un état n’a aucune importance. S’il gagne l’état, il gagne tous les électeurs de l’état. Qu’un candidat gagne avec une voix d’avance ou plusieurs millions ne changera rien, il pourra choisir l’identité de la totalité des électeurs de cet état.
    Le Maine et le Nebraska sont les seules exceptions : deux électeurs par état iront au gagnant de l’état mais les autres (deux dans le Maine, trois dans le Nebraska) seront attribués au vainqueur de chaque district de l’état.

    Et comme vous le savez certainement, il faut 270 électeurs pour gagner les élections.

    Dans certains états (à faible population, ou a tendance politique marquée) savoir qui va gagner un état est facile est rapide. Et le vainqueur de l’état peut être annoncé très rapidement, dès que les bureaux de vote sont fermés, avant même d’avoir fait le décompte officiel. Un peu comme en France quoi.

    Toutefois notez que ces annonces n’ont rien d’officielles, c’est de l’ordre du “on en est sûrs, donc on peut le dire.” Mais l’annonce officielle est toujours faite que plusieurs jours plus tard, par le Secrétaire d’État de l’état en question, et une fois que le décompte réel est terminé. Et il prend plusieurs jours à peu près partout, juste, le public et les médias ne s’en préoccupent plus , une fois la victoire décidée.

    Si on est sûrs des résultats d’assez d’états pour qu’un candidat atteigne les 270 grands électeurs, la messe est dite, le perdant concède la défaite, le vainqueur est très content et la phase de transition peut commencer.

    Ce n’est pas toujours le cas, parfois les résultats d’un état sont trop serrés pour annoncer un vainqueur avec un décompte incomplet. Et donc il faut compter assez de votes jusqu’à qu’il devienne mathématiquement impossible pour un candidat de perdre.

    Mais, je répète, la totalité des votes sont comptés dans tous les états. Par exemple, au moment où je tape ces lignes, seulement 66% des votes de Californie ont été comptés, pourtant la victoire de Biden dans cet état a été annoncée à l’instant de la fermeture des bureaux de vote, parce que rien n’a jamais laissé entrevoir une possible victoire de Trump dans l’état, et aucun des résultats partiels n’est allé dans ce sens.

    Comparez par exemple avec le Texas. La victoire républicaine n’est en général qu’une formalité dans cet état, et la victoire du candidat républicain est habituellement déclarée instantanément elle aussi. Mais pas cette année. Cette année il y a eu un doute pendant un moment, et la victoire de Trump au Texas n’a été déclarée qu’au bout de plusieurs heures.

    En effet, cette année, en plus de changements démographiques dans certains états, il y a un nouveau facteur qui entre en jeu :

    Le Covid-19 s’invite aux élections

    Comme vous le savez, cette année n’est pas une année normale. Et je ne parle pas du fait que le président sortant est un fasciste entre autres choses peu ragoûtante. Je parle bien entendu de l’épidémie de Covid-19 qui frappe le pays de plein fouet. À cause de celle-ci, la majorité des Américains ayant un peu de bon sens ont décidé de voter par correspondance. Car voyez-vous c’est possible aux États Unis (pourquoi ça ne l’est pas en France, je ne sais pas, c’est dommage, il y aurait moins d’abstention, mais c’est un autre sujet).

    Dans un certain nombre d’états (vous aurez compris depuis un moment que chaque état organise les élections plus ou moins à sa façon – en suivant les mêmes règles de base, mais avec des particularités dans chaque état – pas d’organisation nationale de la chose) cela n’a pas vraiment eu d’influence sur la chronologie de l’annonce des résultats. Essentiellement parce que les votes sont comptés au fur et à mesure de leur réception, ou tous en même temps, mais avant le jour de l’élection, etc.

    Mais dans d’autres états… au hasard la Pennsylvanie… certains gouvernements locaux (tous Républicains, certainement une coïncidence) ont refusé de compter ces votes à l’avance. Et ce malgré le fait que cette année, parce que le Covid-19, il y a des états où plus de gens ont voté par correspondance qu’en personne !

    Et donc si on commence à compter les votes plus tard, ça va prendre plus de temps. Surtout que compter un vote par correspondance prend plus de temps (il faut vérifier les signatures et autres éléments permettant d’indiquer que le bulletin appartient bien à la bonne personne et ce genre de choses).

    Oh et détail important, l’acte même du dépouillement est très différent aux US et en France.

    En France, on ouvre l’enveloppe, on regarde si le petit bulletin qui est dedans est conforme aux règles, on lit le nom dessus, et hop, un vote de plus pour cette personne. On passe au suivant.

    Au US, on vote en même temps, sur le même bulletin, pour le président, mais aussi pour élire son député, parfois son sénateur, son gouverneur, son shérif, parfois un juge, le maire, et toute une série de référendums. De manière générale, on vote pour plus de choses aux US qu’en France, et surtout on vote pour tout en même temps.
    Donc dépouiller un vote peut prendre pas mal de temps, car il faut en fait décompter un grand nombre de votes pour des choses différentes, tout en vérifiant qu’il n’y a pas d’irrégularités pour chaque vote contenu sur la même feuille de papier.

    Et c’est aussi cela qui donne des résultats partiels fluctuants. Surtout cette année, où il est clair que les gens ayant un peu de bon sens ont voté en masse par correspondance ou, tout simplement en avance (ce qui est aussi possible dans certains états), alors que les autres ont voté le jour même par inconscience ou bêtise (je parle de ceux qui avaient le choix, parfois on ne l’a pas).
    Ce qui donne ce que l’on a vu dans le Wisconsin, Michigan, Pennsylvanie ou Géorgie. Les premières estimations voient Trump en tête (essentiellement les votes en personne du jour), et Biden le dépasse rapidement au fur et à mesure que les autres votes (par correspondance ou en avance) sont comptés.

    En Arizona c’est plus flou parce que le vote par correspondance est chose habituelle et utilisé par les électeurs des deux partis.

    Dans le Nevada, si j’ai bien saisi, ils ne sont pas habitués aux élections serrées, et ils n’ont pas les moyens humains (parce que ça coûte de l’argent et le Nevada n’aime pas les impôts ?) un nombre de votes bien plus important que d’habitude.

    Car oui, n’oublions pas que l’abstention cette année est la plus faible depuis près de 100 ans.

    Une dernière chose

    En fait au moment où je tape ces lignes, la messe est dite. Biden a gagné l’élection.
    Toutefois aucun des grand médias nationaux ne l’annonce directement. Aucun ne déclare sa victoire.
    Et de plus en plus de gens se demandent pourquoi.

    Je n’ai pas la réponse, mais je soupçonne deux choses :
    Les résultats n’étant pas encore totalement irréfutables personne n’ose être le premier à potentiellement dire une grosse connerie qui pourrait avoir un drôle d’impact à cause de la situation particulière dans laquelle nous nous trouvons (un président sortant ayant perdu la raison, refusant d’admettre la défaite et prêt à pousser les franges terroristes de ses supporters à attaquer le processus démocratique). Trump veut lancer des procès sans fondements, les médias n’ont pas envie de dire une connerie qui donnerait un fondement aux  avocats de Trump.
    De plus, j’ai comme l’impression que les grand médias se sont mis d’accord pour attendre que ce soit FOX News qui l’annonce. Pour des raisons liées à la nature du président sortant. Mais ceci n’est qu’une préssupposition de ma part. Mais il est intéressant de voir la réaction des annonceurs de chez FOX en ce moment, et leurs mines déconfites.

     

    tl;dr

    Donc voila en gros…

    Compter tous les votes prend du temps parce que :

    • L’estimation du pourcentage total des votes n’a pas d’importance pour déterminer le gagnant (c’est celui-ci qui permet des résultats rapides en France).
    • Certains états sont très serrés, on ne peut pas estimer un gagnant à l’avance et le nombre de Grands Électeurs attribués dépend de l’identité du gagnant, pas du pourcentage de votes.
    • Les bulletins de vote comportent tout un tas d’élections, pas juste un nom sur un bout de papier comme en France.
    • Cette année, le Covid complique les choses en augmentant considérablement le nombre de votes par correspondance qui prennent plus de temps à être dépouillés pour diverses raisons techniques et légales.
    • L’absention est faible, donc bien plus de votes à décompter pour autant de moyens humains.

    J’ai du oublier deux ou trois détails, mais voila l’explication en gros.

     

    Maintenant vous savez presque tout, et si je puis me permettre un avis personnel, tout cela serait bien plus rapide si les États Unis n’étaient pas gangrénés au point que 70 millions d’électeurs veulent d’un fasciste, raciste, gros porc, stupide et fou comme président.

     

    La carte électorale au 6 novembre au soir (heures américaines)

     

     

  • C’est moi qui ai fait ça ?

    C’est moi qui ai fait ça ?

    Quoi ?

    Mais non, ce blog n’est pas mort, c’est surtout que je suis très occupé sous d’autres latitudes ces temps-ci. Si je vous manque, sachez que je suis un peu plus actif sur Twitter. On m’avait aussi dit du bien de Mastodon, donc je m’y essaie un peu ici, mais ce service est à peine plus actif que ce présent blog.

    Mais aujourd’hui c’est de Twitter dont je veux vous parler.

    Hier, Bernie Sanders (pour qui je voterais si j’étais citoyen américain) a posté ça :

     

     

    Tweet auquel j’ai répondu ceci :

     

     

    Pas de réponse, je ne m’attendais pas à une non plus.

    Sauf qu’une heure plus tard, sur la page Facebook de Bernie Sanders, on a pu lire ceci :

     

     

    Donc voila, je vous laisse en tirer les conclusions que vous voulez, je ne sais même pas s’il y a des conclusions à en tirer. Il s’agit probablement d’une coïncidence. Mais imaginons une seconde qu’il soit élu, imaginons une seconde que les US s’en prennent vraiment enfin aux milliardaires… Cet un effet-papillon assez vertigineux ne trouvez-vous pas ?

     

    Bon sur ce, je retourne dans mon lac, et je reposterai ici un jour, qui sait quand…

     

     

  • Bonne Année 2017 ? Je ne suis pas vraiment optimiste là dessus…

    Bonne Année 2017 ? Je ne suis pas vraiment optimiste là dessus…

    Salut.
    Ouaip, enfin de retour. Du moins pour l’instant.
    Mon silence de ces derniers mois ? Je pourrais l’attribuer à la faute à pas le temps, mais le fait est que si j’avais vraiment voulu, j’aurais pu.
    Non, chais pas, c’est l’état du monde, là, qui me fout un coup.

    Malgré toutes les merdes partout, depuis la nuit des temps, chais pas, je me disais que là, peut-être enfin, l’humanité commençait à réaliser que ça merdait grave, et qu’il fallait faire quelque chose… Depuis quelque temps, on semblait à l’abri de gros conflits mondiaux, voire même régionaux pour au moins quelques décennies de plus (à l’exception du Moyen-Orient, bien entendu ; là-bas, je sais juste pas comment les choses vont pouvoir se régler un jour). Le monde semblait enfin comprendre qu’agir contre les changements climatiques devenait une sacré priorité…

    Et puis, début novembre 2016….

    Trump…

    Honnêtement, j’ai encore un peu de mal à en parler clairement sans m’énerver.
    Comment ces imbéciles, ces attardés mentaux à l’inculture crasse ont pu voter pour un être aussi répugnant, dangereux et pathétique ?

    Je ne peux décolérer contre eux. Jamais je ne leur pardonnerai.
    On peut analyser la victoire de l’étron orange de toutes les façons possibles et imaginables : Hillary a été nulle, Poutine a eu une influence (je vais y venir), l’abstentionnisme, au final, le fait est que plusieurs millions de personnes ont pensé qu’un tel homme avait sa place à la Maison Blanche.

    Au final, c’est eux les responsables, les coupables, et personne d’autre.
    Il n’y a pas de pardon possible.

    Là, je commence à en entendre certains ici : “mais pourquoi tu es si en colère, après tout tu n’es pas américain, tu ne vis même plus aux États Unis depuis plus de 10 ans.”

    Chers “certains”, j’ai peur que n’ayez pas vraiment prêté attention à ce qu’il vient de se passer.

    Alors, trois choses.
    La première est effectivement personnelle. J’ai longtemps vécu dans ce pays, j’y ai encore beaucoup d’attaches, et de nombreux amis qui vont énormément souffrir au cours des prochaines années.

    Alors, certes, cette première raison est toute personnelle, mais les deux suivantes vous concernent tout autant que moi et le reste du monde.
    Vous n’êtes pas sans ignorer que les États Unis sont la première puissance du monde et que son influence sur le reste de la planète est très grande dans bien des domaines. Comme disait je ne sais plus qui, “quand les États Unis s’enrhument c’est le monde entier qui éternue.” Quelles vont être les conséquences sur le monde entier d’un tel incapable aux commandes du pays ? Nul ne peut le dire, mais ça va pas être mieux que chez lui, voire pire.

    La troisième chose, et c’est lié à la première, c’est que nous sommes à un moment charnière de l’histoire. Pas de l’histoire contemporaine, mais bien de l’histoire de l’humanité. Le réchauffement climatique entre dans une phase où si nous ne changeons pas nos modes de vie, tout particulièrement nos méthodes de production d’énergie de manière drastique, nous courrons à la catastrophe. Il est déjà impossible de l’empêcher. On peut encore en réduire les effets, mais bientôt, très bientôt, là, presque maintenant, il sera trop tard pour ça aussi. Et un énergumène qui dit que le changement climatique est un canular arrive à la tête du pays qui émet le plus de CO2 au monde et qui n’a qu’une intention : de maximiser l’utilisation des énergies fossiles.

    Et c’est probablement la chose qui me met le plus en colère et qui me déprime.

    Ces idiots du village qui l’ont mis au pouvoir vont peut-être tout simplement être la cause de la fin de l’humanité telle qu’elle existe, ils vont priver nos enfants d’une vie potable, voire même d’un futur. Mon fils commençait juste à marcher alors que ces imbéciles votaient pour ce porc orange. Je les tiens tous coupables de l’avenir qu’il n’aura peut-être pas. Ni lui, ni sa grande sœur, ni tous les autres enfants du monde.

    Néanmoins, parce que je suis un incorrigible optimiste, je me dis qu’il y a encore un peu d’espoir. Il est clair maintenant que les jours des États Unis comme première puissance mondiale sont comptés. Et même, si les dégâts de cette chute vont être considérables, peut-être que la conséquence sera que les actes des climato-sceptiques américains deviendront insignifiants.
    Mais c’est terrible d’en venir à souhaiter la chute d’un tel pays (et donc : la misère et la désolation pour ses habitants) pour espérer le futur le moins pire possible.

    Le problème, et c’est là que la bât blesse, si les États Unis perdent leur statut de première puissance, le résultat ne sera pas celui que certains de mes connaissances anti-“impérialistes” imaginent un peu naïvement. Non, nous n’allons pas nous retrouver avec un monde multipartite et où chaque pays aura son mot à dire. La place laissée va vite être comblée : la Chine n’attend que ça… Elle l’a même annoncé toute en finesse et hypocrisie il y a quelques jours.

    La Chine et…

    La Russie…

    Cela nous emmène au deuxième grand problème de cette sombre histoire : Vladimir Poutine.

    Depuis quelques années, Poutine n’a plus qu’un but, celui de restaurer la place de la Russie sur la scène internationale, mais il n’y arrive pas, et n’y arrivera pas – je ne peux m’empêcher de citer une phrase d’Obama datant de décembre dernier et qui n’a pas eu le retentissement que j’imaginais :

    They are a smaller country, they are a weaker country, their economy doesn’t produce anything that anybody wants to buy except oil and gas and arms. They don’t innovate.”

    Je la traduis pour les réfractaires à l’anglais parmi vous : “Il s’agit d’un petit pays, d’un pays faible, leur économie ne produit rien que l’on puisse vouloir acheter sinon du pétrole, du gaz ou des armes. Ils ne savent pas innover.”

    Obama a prononcé ces paroles avec un but clair : insulter Poutine, et nous savons tous que les meilleures insultes, celles qui font mal, sont celles qui disent la vérité.

    Oui, Poutine rêve de grande Russie, mais il sait très bien au fond de lui que la Russie ne sera plus jamais grande. Depuis 17 ans qu’il a pris le pouvoir à Boris Eltsine, il a réussi peu à peu à asseoir son pouvoir personnel, et il est devenu à l’intérieur même du pays aussi puissant qu’un Tsar ou un Secrétaire Général du Parti de l’époque soviétique. La démocratie y est morte, sa main-mise sur le pays est totale. Mais il échoue encore et toujours à redonner à la Russie une place à la table des grands. Elle n’y est qu’à peine tolérée, et uniquement à cause de son arsenal nucléaire. Sans ce dernier, la majorité de la communauté internationale n’aurait que faire d’elle.

    En conséquent, Poutine a décidé que si la Russie ne pouvait pas redevenir grande, alors il allait s’attaquer à la grandeur de ses adversaires et les diminuer autant que possible.

    Vous voyez où je veux en venir.

    Est-ce que Poutine a vraiment des documents compromettants sur les déviances sexuelles et financières de Donald Trump ? Ou bien est-ce que Trump est tout simplement un imbécile qui se laisse manipuler par Poutine ? Aucune idée au moment où j’écris sur ces lignes. Mais ça n’a aucune importance, le résultat est le même.
    La façon dont Trump insulte, attaque et manque de respect a à peu près tout le monde sauf Poutine, me donne envie de penser à la première hypothèse, mais d’un autre côté, il est criblé de documents compromettants et très publics que le monde entier a vus et entendus, et aucun d’entre eux n’a arrêté son ascension.
    Mais quoiqu’il en soit, le résultat c’est que Trump est cette espèce de version 21e siècle d’un Candidat Mandchou, il n’a pas encore agi sur la scène internationale (je n’ose imaginer les rencontres internationales entre gouvernants à venir) mais tout ce qu’il a dit pour l’instant, tout particulièrement ses attaques contre l’Union Européenne et l’OTAN semblent lui avoir été dictées mot pour mot par Poutine.

    J’en entends qui ricanent en France, que c’est bien fait pour la gueule des USA, qu’eux aussi ont manipulé des tas d’élections dans d’autres pays à droite et à gauche. Ceux-là, n’ont donc rien compris, et si seulement ils dépassaient un peu leurs pensées mesquines et revanchardes pour essayer de voir une vision d’ensemble de la chose.

    La vraie cible de la Russie n’est pas tant les États Unis que l’Europe. Affaiblir les États Unis, Poutine doit certainement en faire des rêves humides, mais pourtant ce n’est pas exactement son but premier.

    Certes, c’est une douce vengeance 26 ans après l’effondrement de l’URSS, mais ce qui intéresse vraiment Poutine, c’est que la sphère d’influence des États Unis se réduise le plus possible, tout particulièrement en Europe.

    Poutine veut tuer l’Union Européenne qui est en train de devenir son obstacle principal, plus encore que les US.
    Plus tôt, je disais que la Russie ne pourra redevenir superpuissance mondiale comme l’URSS le fut, mais ce qu’elle peut faire, c’est au moins contrôler une région du globe et en faire son terrain de jeu. Cette région, c’est l’Europe.
    Elle a déjà commencé à avancer ses pions. Souvenez-vous de la Georgie il y a quelques temps, et plus récemment de l’Ukraine.
    La Georgie était une espèce de test. La communauté internationale l’a laissée faire. L’Ukraine c’était plus délicat, mais là aussi, ça a marché. La Russie a annexé une partie de l’Ukraine et que s’est-il passé ? Rien. Absolument rien. Le monde entier l’a laissé faire.

    Il n’en faut pas plus à Poutine pour comprendre que les pays soit disant plus puissants que le sien n’oseront pas entraver sa route si ça ne va pas directement à l’encontre de leurs propres intérêts.

    Il y a une chose que la Russie n’a n’a jamais digéré, c’est que certains des pays de sa sphère d’influence passée, voire pire, certaines anciennes républiques faisant partie de l’URSS font désormais partie de l’Union Européenne. Tout particulièrement la Pologne et les pays baltes.

    Sa guerre d’influence sur le continent a déjà commencé, très subtilement jusqu’à présent, car les États Unis veillent encore au grain. Mais que va-t-il se passer bientôt ? Quand Trump aura affaibli les US, voire pire, remis en cause les alliances avec l’Europe, voire démantelé l’OTAN ?
    Poutine va très certainement s’attaquer de plus en plus directement à l’Europe de l’Est.

    Oh, pas avec des chars, du moins pas tout de suite.

    Au fur et à mesure que les États Unis vont s’affaiblir et que l’Union Européenne va se désunir, attendez vous à voir de plus en plus d’agents provocateurs dans les pays baltes et en Pologne, en espérant que ces pays ne se retrouvent pas dans la situation de l’Ukraine où la Russie a pu faire son Anschluss sans que personne ne lui mette de bâtons dans les roues.

    Comme je viens de l’énoncer, pour cela, la Russie a besoin d’un affaiblissement des États Unis, mais aussi un affaiblissement, voire une dislocation de l’Union Européenne. Cet affaiblissement a déjà démarré et presque toujours derrière, on retrouve la patte de Poutine qui agite ses petites marionnettes dans de nombreux pays, à commencer par les partis d’extrême-droite qu’il contrôle de plus en plus, à commencer par le FN et la mère Le Pen.
    Attention, ils ne sont pas les seuls, même dans la droite plus traditionnelle, on retrouve des petits soldats de Poutine. Par exemple, si vous vous demandez ce que fait cette crapule de Thierry Mariani depuis qu’il a quitté le gouvernement en 2012, il s’occupe surtout de promouvoir la cause de Poutine dès qu’il le peut depuis son statut de député des Français à l’étranger de la Onzième circonscription, celle incluant la Russie et l’Ukraine, entre autres pays. Vous trouverez de très belles odes au dictateur russe dans son compte Twitter assez régulièrement. À croire que Poutine possède quelques Kompromat sur lui – quoiqu’il n’en a même pas vraiment besoin avec un être aussi veule.

    Bref, la guerre menée par le Kremlin en Europe de l’Ouest est très pernicieuse car invisible. Comme au temps de la guerre froide, il s’agit bien d’une guerre idéologique, mais cette fois-ci, les deux camps ne sont pas séparés géographiquement. Au contraire, ils occupent les mêmes territoires. D’un côté, tout ce qui représente l’Occident aux yeux de Poutine : la tolérance, le multiculturalisme, le cosmopolitisme, le libéralisme (dans son sens original, c’est-à-dire prônant la diversité et les libertés individuelles). Ces choses-là, il les déteste, et c’est pour cela qu’il finance et aide de diverses manières les factions et individus politiques xénophobes, racistes, homophobes, sexistes, autoritaristes, et nationalistes.

    C’est là que se situe la ligne de la ligne de front aujourd’hui, et ne vous y trompez pas, Poutine a pour but d’affaiblir nos démocraties déjà mal en point, et si elles pouvaient s’effondrer, il ne verrait pas ça d’un mauvais oeil. Il fera même tout ce qu’il peut pour y parvenir. Cette Europe de l’Ouest effrontée lui manque de respect depuis trop longtemps, mais sans les États Unis pour la protéger, et avec l’aide de ses petites marionnettes d’extrême-droite, il va bientôt être temps de s’en charger.

    C’est aussi pour cela que l’élection de Trump est une catastrophe pour tous, même si vous n’avez que faire des États Unis, même si on arrive par miracle à mitiger les effets du réchauffement climatique.

    Bref, pas de quoi ricaner…

     

    Lectures supplémentaires conseillées :

     

    Sources dessins :

    • Dessin de Trump : désolé, je ne trouve pas la source de ce dessin.
    • Poutine : Christian Adams